September 24, 2005

Le Conseil de la concurrence (ne) se prononce (pas) sur le positionnement publicitaire

La société Concurrence, chevalier blanc bien connu des spécialistes du droit de la... concurrence justement, et auteur de plusieurs recours qui ont contribué à enrichir la matière, s'était plainte le semestre dernier des conditions dans lesquelles se déroulent sur internet la publicité et la comparaison des prix des appareils photos. En particulier, elle reprochait à Google
d'inclure dans les conditions d’accès à son service Adwords les clauses abusives suivantes : textes originaux en anglais faisant foi, compétence du droit et des tribunaux californiens, liberté discrétionnaire de modifier, de supprimer ou de faire figurer des annonces sur un autre site. La société saisissante reproche également à la société Google France de lui refuser l’accès à son service de liens commerciaux Adwords et d'utiliser le mot clé « sony ».
On lira avec intérêt ce dernier membre de phrase : attaquée sur son flanc gauche pour commercialiser des mots-clef correspondant à des marques, voilà que la société Google est attaquée sur son flanc droit pour refuser de vendre de tels mots-clef ! La décision du Conseil sur ce point ne mérite pas commentaire :
Il convient tout d’abord de relever que les clauses incriminées par la société Concurrence à l’appui de sa saisine du 10 mars 2005 dataient de 2003 et n’étaient plus en vigueur au jour de la saisine, leur remplacement ayant eu lieu en juin 2004.
Les clauses dénoncées, concernant l’attribution de compétence et les règles d'interprétation, destinées à régir les rapports entre des professionnels, parties à un contrat, ne soulèvent pas de difficultés au regard du droit de la concurrence. Par ailleurs, la possibilité pour Google de faire apparaître une annonce sur des sites partenaires (ce qui correspond en fait au service Adsense) n’apparaît pas comme illicite, d’autant qu’il est prévu que l’annonceur puisse s’y opposer. Enfin, la clause donnant la possibilité à Google de modifier ou supprimer une annonce de façon discrétionnaire n'a pas un caractère anticoncurrentiel mais son utilisation aurait pu l'être. Toutefois, rien dans la saisine ne permet de présumer qu’une utilisation de cette clause ait été faite par la société Google France à des fins ou avec des conséquences anticoncurrentielles. Au surplus, ces différentes clauses ont fait l'objet d'une mise à jour le 19 avril 2005. Elles stipulent désormais la compétence des tribunaux français, l'application du droit français et prévoient que les modifications et suppressions des annonces se font dans le respect du contrat.
Il résulte de ce qui précède qu’aucun des éléments apportés n’est suffisant pour caractériser l’existence d’une pratique anticoncurrentielle s’agissant des conditions d’accès au service Adwords.
Appelée à préciser sa politique relative à l'usage de la marque "Sony" dans les publicités - et donc dans des liens commerciaux -, la société Sony indique
qu’en l’état actuel des règles de la propriété intellectuelle, un revendeur ayant licitement acquis des produits d’une marque peut en faire la promotion en utilisant cette marque, tant qu’il en est fait un usage normal et qui ne nuit pas à l’image de la marque, du produit ou du fabricant. Elle a précisé à cet égard : Quant à l’usage [que les revendeurs] peuvent faire de la marque ou du mot "sony" pour décrire leurs activités dans l’annonce qui sert de base à leur référencement par les sites Google ou Kelkoo, il relève d’un usage tout à fait normal, puisqu’il se limite, en fait, à l’indication de ce que ces opérateurs vendent effectivement des produits Sony.
Elle ne s'oppose donc pas à l'usage de la marque, ce qui distingue l'espèce de celles qui ont donné lieu à des décisions de justice (telles que "Bourse des vols" ou "Vuitton").

Décision du Conseil de la Concurrence du 27 juin 2005.

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