May 30, 2008

Tribunal de commerce de Montpellier, 22 mai 2008 (référé) : condamnation sans surprise de la société qui avait enregistré les noms partenaires-europeens.fr et partenaires-europeens.com, similaires à la marque "PE Le partenaire européen" pour designer des services identiques à ceux visés par l’acte d’enregistrement de cette marque.

May 29, 2008

Régulation communautaire du nommage

Le Sénat français vient d'examiner plusieurs directives communautaires du secteur des communications électroniques.
Le texte E3701 a pour objet de modifier le cadre réglementaire des réseaux et services électroniques, ainsi que les dispositions relatives à l'accès à ces réseaux, à leur interconnexion, ou leur autorisation.
Si l'essentiel du texte est relatif au spectre et à la gestion des fréquences, on trouve une allusion discrète aux noms de domaine :
En raison du degré élevé d'innovation technologique et du grand dynamisme des marchés dans le secteur des communications électroniques, il faut pouvoir adapter la réglementation rapidement, de façon coordonnée et harmonisée au niveau européen, car l'expérience montre que les divergences d'application du cadre réglementaire par les autorités de régulation nationales peuvent entraver le développement du marché intérieur. Par conséquent, il convient de conférer à la Commission le pouvoir d'arrêter des mesures d'application dans des domaines comme le traitement réglementaire des nouveaux services, la numérotation, le nommage et l'adressage, les problèmes des consommateurs, dont l'accessibilité en ligne, et les mesures comptables réglementaires.
Ce considérant (n° 37), un peu fourre-tout, annonce la volonté de la Commission de se pencher sur la régulation des espaces de nommage...
Cette volonté prend corps à l'article 19 du texte. Celui-ci prévoit que la Commission qui constaterait "des divergences dans l'accomplissement, par les autorités de régulation nationales, des tâches réglementaires" spécifiées par cette directive, pourra "publier une recommandation ou une décision sur l'application harmonisée des dispositions" de celle-ci. Ces mesures pourront intervenir pour traiter des "questions de numérotation, de nommage et d'adressage, y compris séries de numéros, portabilité des numéros et identifiants, systèmes de traduction de numéros ou d'adresses, et accès aux services d'urgence 112"
(article 19.4 b) .

La directive 2002/21/CE, que viendrait modifier ce texte, ne parle pas d'autorité "de régulation nationale" mais d'autorité "réglementaire nationale". Admettons, ce qui est des plus plausibles, que les deux expressions recouvrent la même entité. Celle-ci a été définie en 2002 comme devant être juridiquement distincte et fonctionnellement indépendante de toutes les organisations assurant la fourniture de réseaux, d'équipements ou de services de communications électroniques, et exercer ses pouvoirs de manière impartiale et transparente. Dès lors qu'il n'existe pas une telle entité en matière de nommage en France, on ne voit pas a priori comment la Commission pourrait constater que la régulation des noms de domaine à la française diverge de celle d'autres Etats-membres.

May 28, 2008

Aux grands mots-clef les grands remèdes

Ce siècle a vu naître des formes nouvelles d'usage de signes : le parking de noms de domaine en est un exemple, la publicité par mots-clef sur les moteurs de recherche en est un autre.

Les AdWords font ainsi régulièrement l'actualité judiciaire, depuis octobre 2003 et la décision "Bourse des Vols". La cour de cassation était saisie de cette affaire, et a rendu un arrêt le 20 mai 2008 (n° 05-14.331). Elle considère "qu'il est constant que le prestataire de service de référencement payant ne fait pas usage du mot-clef reproduisant ou imitant la marque pour désigner ses propres produits et services" pour ensuite s'interroger sur la licéité de la pratique au regard du droit communautaire. La question étant sérieuse, elle a décidé de la renvoyer à la cour de justice des communautés européennes : la régie publicitaire proposant des publicités par mot-clef fait-elle un usage de marque que son titulaire est habilité à interdire?

Le même jour, la cour de cassation a renvoyé deux autres affaires AdWords devant cette même CJCE, dans les contentieux LVMH (n° 06-20.230), et CNRRH (n° 06-15.136). Sur Juriscom.net, Frédéric Glaize et moi remettons en perspective ces contentieux.

May 27, 2008

Evolution of the .eu ADR rules: Public consultation

The Arbitration Center for .eu Disputes invites all interested parties to comment its new proposal to implement a class complaint (which would enable multiple Complainants to join in a single complaint against a suspected cybersquatter).
This is the second public consultation on the evolution of the .eu ADR Rules and Supplemental Rules.

Un arrêt nippon ni mauvais

La SARL Voyageurs du Monde exerce depuis 1979 une activité d'agence de voyage sous diverses enseignes "VOYAGEURS", suivies du nom du pays ou du continent. Son fondateur, M. S., l’a revendu, mais reste gérant d’une autre société qu’il a créée, la SARL Voyageurs au Japon.
M. S. fut le titulaire de la marque "VOYAGEURS AU JAPON", qu’il a vendue en 1996 à la SARL Voyageurs du Monde. Celle-ci l’a concédée dans la foulée à la SARL Voyageurs au Japon, la licence courant sur dix ans.

La société Voyageurs au Japon détient les noms de domaines voyageursaujapon.fr, voyageursaujapon.com, voyageursaujapon.net et voyageursaujapon.org depuis fin 2003. Trois ans plus tard, le premier de ces noms n’est pas renouvelé. Quelques semaines après, la société Voyageurs du Monde l’enregistre à son profit.
Après avoir découvert ce fâcheux enregistrement, la société Voyageurs au Japon, dit la décision, « a mis en demeure Voyageurs du Monde, lui indiquant que le non-renouvellement, par elle, de ce nom de domaine, n'était dû, en dépit de sa demande, qu'à un problème technique imputable à l'AFNIC. Elle a, donc, demandé à Voyageurs du Monde de lui restituer ce nom de domaine en l'avertissant que toute exploitation de ce nom serait constitutive d'un acte de concurrence déloyale ».
La mise en demeure est restée sans réponse, ce qui amena la saisine en référé du tribunal de commerce de Paris.

Pour ce dernier, le nom de domaine litigieux a été régulièrement enregistré par le nouveau titulaire ; cela n’était pas de nature à causer un trouble manifestement illicite au demandeur, d’autant qu’il existait un litige sérieux entre les parties sur la propriété de la marque (ne ressortant pas de sa compétence) ; et puis « il n'était pas possible de déclarer illicite l’utilisation d'un nom de domaine par une société qui se prétendait propriétaire d'une marque déposée depuis mars 2000, au seul motif qu'une autre se prétendait également propriétaire de cette marque et était victime d'une erreur technique pour avoir abandonné le nom de domaine ».

La cour d’appel de Paris, saisie à son tour, a estimé que le nom disputé « était disponible lorsqu'il a fait l'objet d'un enregistrement conforme aux dispositions de la loi du 9 juillet 2004, au profit de VOYAGEURS DU MONDE » (l’arrêt n’est pas explicite sur cette conception de la conformité ; l’A.F.N.I.C. n’était pas partie à l’affaire).
Afin d’examiner si cet enregistrement portait atteinte au droit de la société plaignante, la cour va observer que le nom voyageursaujapon.fr est identique à la dénomination sociale de cette dernière, mais qu’il est « également identique à la marque cédée à [l’autre partie] » (autrement dit la marque VOYAGEURS AU JAPON).
La cour observe aussi qu’à la date de l’enregistrement du nom litigieux, la licence d’utilisation de cette marque était arrivée à son terme. Et de juger qu’en réenregistrant pour elle le nom de domaine voyageursaujapon.fr, la société titulaire de la marque n’a pas commis d’acte manifestement illicite, « en dépit du fait que ce nom de domaine était identique à la dénomination sociale de l'appelante », parce que « ledit nom de domaine était disponible, que ledit enregistrement a été régulier, qu'il a consisté en l'usage, par l'intimée, d'un nom de domaine identique à la marque qu'elle avait cessé de concéder à Voyageurs au Japon et que cette dernière s'était engagée à ne plus exploiter la marque "Voyageurs au Japon" sur quelque support que ce soit, tout en conservant sa dénomination sociale ».
Pour se décider, la cour d’appel note aussi que la société Voyageurs au Japon ne conteste pas avoir fait enregistrer et renouveler l'enregistrement de trois autres noms de domaine commençant par "voyageursauj apon", ce qui fait écho au courant de jurisprudence selon lequel peuvent coexister des activités similaires sous des noms de domaine descriptifs similaires.

[Paris, 19 mars 2008, à paraître sur la Gazette du Net]

May 26, 2008

Suite, et vraisemblablement, du conflit Auto IES / Lantec Corporation / SafeNames.
Cette dernière société, registrar de son état, avait enregistré en mai 2004 autoies.fr en son nom, pour le transférer en juin 2005 à Lantec. Au vu des marques de la S.A. Auto IES, le tribunal avait jugé que les deux autres sociétés étaient ensemble coupables de contrefaçon.
Le registrar a fait appel de la décision, soutenant principalement qu’il n’avait pas procédé à l’enregistrement pour lui, mais pour son client, en attendant que celui-ci remplisse les critères d’éligibilité à l’obtention d’un nom en .fr.
La cour d’appel confirme la totalité du jugement rendu. On relèvera la remarque des juges selon laquelle, dès lors que les mises en demeure ont été faites au registrar, rien ne permet d’établir que le client pour le compte duquel il agissait en a eu connaissance.

[Paris, 19 mars 2008, à paraître sur la Gazette du Net]

May 25, 2008

Lâche tes Com !

Il va être de plus en plus délicat de déposer une marque comprenant un terme évocateur suivi de com ou Com. C'est ce que l'on peut retenir en substance d'un arrêt du 22 mai 2008 du TPICE, et ce qu'a appris à ses dépens la société Radio Regenbogen Hörfunk in Baden Geschäftsführungs-GmbH qui voulait déposer la marque communautaire RadioCom, en particulier pour des services radiophoniques et de la publicité en ligne.

Selon le TPICE, les consommateurs pourraient comprendre le signe verbal comme étant l’indication d’un nom de domaine Internet. En effet, "la syllabe « com » est une abréviation habituelle, qui est utilisée essentiellement sur Internet pour désigner le domaine de premier niveau « .com ». Ainsi, des signes comme Radio.com comporteraient des indications directement descriptives et devraient dès lors être rejetés. (...) Le public pertinent pourrait donc comprendre le signe RadioCom comme faisant référence à un domaine Internet, et ce d’autant plus que le consommateur moyen pourrait également percevoir le signe en cause comme la dénomination d’un site web donnant accès à de nombreuses stations de web radio, moyen de radiodiffusion de plus en plus utilisé aujourd’hui".

Le tribunal ajoute que le fait d'avoir choisi d'écrire Com avec une majuscule ne change rien à l'impression laissée aux consommateurs, pas plus que celui de n'avoir pas adopté un point pour faire la césure entre Radio et Com. En effet, "le fait de présenter la marque demandée sans point et le second élément de la marque avec une lettre majuscule « C » est susceptible de renvoyer, dans l’esprit du public pertinent, à un domaine Internet. La lettre majuscule « C » renforce même cette impression, car elle coupe le signe en cause au milieu et met l’accent sur l’élément « com »".

May 24, 2008

This blog is four years old this month.

Thanks to all for your faithfulness (you are more than 500 subscribers to the RSS feed; I remind to all that you can also subscribe to the articles I share without commenting them on this blog).
I also thank you for your comments and/or the information you share.

Nearly 1,500 posts have been published so far (but I wonder how many were really of interest to you!). The template is old and needs a serious update... I will work on it when I have time (ahem).

May 23, 2008

Transaction sur nom de domaine

Les contentieux judiciaires ou arbitraux sont la partie émergée des conflits liés aux noms de domaine. En pratique les contentieux se règlent aussi, bien souvent, par un accord qui intervient entre les parties. Mieux vaut établir une transaction sur mesure, parfaitement adaptée à la situation (des parties et du nom), qu'utiliser un modèle tout fait. Un arrêt vient, si besoin, le démontrer.

La société Twoteam possédait trois déclinaisons : raisonpure-industrie.com, raisonpure-archi.com et raisonpure-multimedia.com. Un accord était intervenu avec la société Raison Pure, aux termes duquel elle cessait de faire usage des noms "raison" et "pure" dans les conditions fixées par la transaction, laquelle visait aussi les noms de domaine.
La transaction était assortie d'une clause pénale de 200.000 €. La société Raison Pure a demandé le paiement de cette somme, après avoir constaté que seul un des noms de domaine lui avait été effectivement transféré, un autre étant tombé entre les mains d'un tiers, et le troisième étant toujours en la possession de Twoteam.
Le juge de l'exécution de Bobigny avait accepté l'octroi de cette somme au demandeur, par saisie-attribution (16 janvier 2007). La cour d'appel de Paris a renversé cette décision.

Signé le 14 décembre 2005, l'accord prévoyait "le transfert par la société Raison Pure Industrie [NDLA : il s'agit vraisemblablement de la dénomination utilisée avant l'accord destiné justement à faire cesser l'emploi de celle-ci] au profit de la société Raison Pure des noms de domaine raisonpure-industrie.com et raisonpure-archi.com dans les 30 jours suivant la signature de la présente transaction par l'ensemble des parties et d'en justifier".
On observera que sur les trois noms annoncés, deux étaient visés... La société demanderesse ne pouvait donc pas arguer qu'il y avait eu violation de l'obligation de transfert. Le juge relève à cet égard qu'une clause prévoyait qu'"il était seulement imposé (...) la cessation de tout usage, sous quelle que forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, des termes "raison pure" pris individuellement, ensemble, associés à quelque terme que ce soit et notamment aux termes "architecture", "industrie" et "mulimédia"". Le juge vise donc une clause générale qui ne portait pas spécifiquement sur le troisième nom, et qui ne porte que sur l'usage de signes - ce qui n'interdisait pas de maintenir l'enregistrement du nom.
Lapsus calami des rédacteurs de la transaction, ou véritable négligence ? On retiendra la nécessité de bien détailler et délimiter les conditions d'une transaction portant transfert de noms de domaine.

Pour expliquer l'échec du transfert d'un des deux autres noms, la cour décrit avec précision les opérations effectuées suite à la transaction, en se basant sur les preuves produites par les parties (on peut s'étonner qu'il soit question d'une "déclaration de cession remplie et signée par le propriétaire (...) adressée à l'AFNIC", dans la mesure où les noms sont en .com...).
En résumé, dans les jours qui suivent la transaction, soit le 5 janvier 2006, le titulaire des noms signe les documents pour le transfert. Ils sont reçus une semaine plus tard par le conseil de la société à qui doit bénéficier le transfert. Les formulaires sont retournés signés au début du mois suivant, et s'enclenche la demande de transfert au registrar. Ce dernier en accuse réception fin février 2006. Fin mai 2006, le registrar informe que les noms n'ont pu être transférés à qui de droit... et que l'un d'eux "était au nom d'un Chinois". L'autre nom sera finalement transféré le 11 juillet 2006.
La société Twoteam devait-elle être jugée fautive de ces errements ? Ce n'est pas l'opinion du juge. Il constate qu'elle s'est acquittée de ses obligations, qui se limitaient à initier le transfert ; elle n'est qu'un maillon dans la chaîne (le document devait être signé par le cessionnaire, puis soumis au registrar), et donc, parce que l'accomplissement du transfert nécessite l'intervention d'un tiers, elle ne peut être rendue responsable de l'échec.
Cet autre volet de la décision montre que l'on ne peut se satisfaire de dispositions trop générales dans les conventions de transfert de nom, et que la sécurité commande d'être précis sur le scénario, à la fois technique et juridique, du transfert que l'on veut initier.

May 22, 2008

Epilo-gay

C'est donc jusqu'en cour de cassation qu'on se sera battu autour du nom de domaine gay.fr. Les spécialistes du secteur ne s'en étonneront pas, étant donnée la valeur intrinsèque du nom. Cet arrêt est le dixième à être rendu par la plus haute instance judiciaire française ; après les arrêts maxi.fr, argus.fr, et decathlon.pl, il confirme les bonnes dispositions de celle-ci envers les génériques.

La cour de cassation a confirmé en tous points l'arrêt d'appel rendu en 2006 :
- les marques GAY INFOS MAGAZINE et GAY, déposées pour des activités de diffusion électronique à destination de la communauté homosexuelle, doivent être annulées ;
- "le terme banal et commun gay peut être utilisé par un tiers au sein d'un nom de domaine dans le but d'identifier la clientèle à laquelle s'adresse le site correspondant, en l'absence de risque de confusion dans l'esprit des consommateurs, et (...) si une telle reprise est susceptible de procurer à celui qui la pratique des économies, elle ne saurait, à elle seule, être tenue pour fautive".

Les titulaires respectifs des noms gay.fr et gay.com doivent donc continuer de faire ménage ensemble sur internet !

[Cass. com., 8 avril 2008]

May 21, 2008

Tirs croisés

C'est peut-être le signe que l'on se bat de plus en plus pour protéger la valeur que constitue un nom de domaine : après la récente décision pneu-online.com, en voici une autre par laquelle les juges français citent une décision UDRP - ce qui montre qu'on se bat sur les deux terrains, judiciaire et extrajudiciaire.
Comme dans l'affaire précédente, l'arrêt porte sur un nom générique, en l'occurrence defiscalisation.com. Pour le sécuriser, son exploitante l'avait aussi déposé en tant que marque. Et avait attaqué avec succès devant le centre d'arbitrage et de médiation de l'OMPI la personne qui avait enregistré i-defiscalisation.com (D2006-540).
L'arbitre avait constaté que cette marque n'était pas distinctive du fait qu'elle est exploitée "pour promouvoir la commercialisation de biens bénéficiant d’un régime fiscal favorable", mais avait néanmoins considérée qu'elle était devenue distinctive par l'usage.

Toujours pour la défense de son activité, cette même personne a engagé une action contre l'exploitant
du nom jedefiscalise.fr. Alors que celui-ci contre-attaquait en demandant l'annulation de la marque DEFISCALISATION.COM, la titulaire de cette marque excipait de l'analyse faite en sa faveur lors de la procédure UDRP. Cette analyse est balayée par la Cour d'appel de Paris, qui dit que la décision UDRP n'est qu'un avis : "cet avis, qui ne lie aucunement la cour, apparaît se rapporter essentiellement à un site et au classement de l'entreprise [sur les moteurs de recherche, NDLA] et est dénué de porter par rapport à la validité des marques susvisées". La marque est donc annulée, ce qui fait échec à l'action en contrefaçon.

Dans cette affaire, l'une et l'autre partie défendaient un nom générique.
=> Prise sous l'angle du défendeur, cette décision est là pour rappeler qu'il est préférable, sinon nécessaire, de se battre sur le terrain judiciaire pour provoquer un débat sur l'ensemble des éléments de fait, et obtenir l'annulation de la marque du demandeur qu'un arbitre UDRP ne peut prononcer.
=> Prise sous l'angle du demandeur, la décision montre qu'il peut être utile d'asseoir la protection d'un nom générique en déposant une marque homonyme, afin de pouvoir justifier d'un titre dans la procédure UDRP.
Et dans les deux cas, il faut engager des moyens pour défendre son actif !

[Paris 25 janvier 2008]

May 20, 2008

Welcome

to the UDRP blog. Guess what this blog is about?

(Keep up the good work, William!)

May 19, 2008

The Future of the Internet

Mettez des vaches dans un pré à la clôture électrifiée : elles n'en sortiront pas. Gardons les internautes à l'intérieur de barrières techniques : leur liberté s'en trouve affectée. Telle était en substance* la thèse de Lawrence Lessig dans Code and other laws of cyberspace (réédité dans une version mise à jour sous le nom Code version 2.0). Si cet ouvrage fondamental peut avoir une suite, c'est Jonathan Zittrain qui l'a écrite, avec The future of the internet - and how to stop it.

Jonathan fait le lien entre différents phénomènes techniques récents : la prolifération de terminaux de connexion contrôlés par le producteur qui les met en circulation (type iPhone), le fait que dans le web 2.0 les logiciels quittent le disque dur pour être trouvés sur des serveurs, les spams/spywares/virus qui font que l'on peut vouloir se replier sur des réseaux fermés pour des raisons de sécurité. Dans ces conditions, à force d'encadrement de la navigation, de paramétrages non décidés par l'utilisateur, etc. le PC familial pourrait finir par ressembler à un grille-pain ou à un four à micro-ondes.* Voilà le constat étayé que fait l'auteur, dans un ouvrage en deux parties dont les deux premières peuvent paraître déprimantes, mais se révèlent surtout éclairantes. Car mieux vaut être conscient de ce phénomène souterrain pour mieux l'affronter et empêcher ses conséquences négatives pour l'avenir des réseaux !
Dans la troisième partie, l'auteur fait des propositions pour enrayer les tendances qu'il critique. Pour le lecteur français, habitué à une régulation venue d'en haut, cette partie paraîtra moins convaincante. Mais cela n'ôte en rien les mérites de l'ouvrage, dont la lecture est recommandée à tous ceux qui s'intéressent à la régulation d'internet sous toutes ses formes.


* je résume grossièrement...

May 18, 2008

Le décret sur les domaines français s'applique-t-il aux pseudonymes ?

Décidément, chaque décision visant le décret du 6 février 2007 (qui régit les noms de domaine rattachés à une extension française) amène son lot d'interrogations.

Au terme d'une procédure, la journaliste Christine Kelly a récupéré christine-kelly.fr. Procédure originale, car le nom a été repris suite à la liquidation judiciaire de la société qui l'avait enregistré pour elle. Ce n'est toutefois pas cet aspect qui retient l'attention.
Dans la décision (Tribunal de commerce de Pontoise), le juge a visé l'article R. 20-44-46 du CPCE, qui prévoit qu'"un nom identique à un nom patronymique ne peut être choisi pour nom de domaine, sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi". Le texte parle sans équivoque d'un nom patronymique, cet adjectif renvoyant, selon les dictionnaires, au nom de famille ou au nom des ancêtres.
Pourtant, Christine Kelly n'est pas le vrai nom de la requérante : le juge souligne lui-même qu'"il est établi par la demanderesse que son pseudonyme est Christine Kelly".

Dans ces conditions, le texte n'aurait pas dû être pris en compte : son champ se limite aux noms patronymiques (ce qui est déjà très large : s'agit-il des noms des personnes de nationalité française, des résidents en France, du nom de tout habitant de la planète ?). C'est donc en violation de la loi que le juge en étend le champ aux pseudonymes.

[Sur la question de l'applicabilité ou non de ce décret, voir par ailleurs sur ce blog]

La Suisse et son .ch

Ce n'est pas un exercice de prononciation... mais un point de vue de Charles Tiné (MailClub) sur l'état et l'évolution de la zone de nommage helvétique.

May 17, 2008

Les noms de domaine, un objet-clé de la gouvernance internet ?

L'équipe VoxInternet a organisé il y a quelques semaines un séminaire sur ce thème. Le compte-rendu en est désormais disponible. Au sommaire :
  • Les noms de domaine, un continuum de régulation. Introduction de la séance par Françoise Massit-Folléa, responsable scientifique du programme Vox Internet.
  • Les offices européens d’enregistrement, une brève comparaison par Marie-Cécile Naves, assistante de recherche du programme Vox Internet.
  • Où en est le .fr ? Présentation de l’enquête AFNIC 2007 par Loïc Damilaville, directeur-adjoint de l’AFNIC et webmaître de DNS News, principal site en français consacré aux questions de NDD, et Patrick Maigron, enseignant-chercheur à l’INT.
  • La gestion des litiges, présentation par Cécile Méadel, CSI-Ecole des Mines de Paris.
  • et quelques points de mon intervention sur Le droit et les litiges sur les noms de domaine.
Bonne lecture !

May 13, 2008

Registrars and registries liability in the EU: a (very) short survey

AUSTRIA: The Austrian Supreme Court ruled that the registry (nic.at) does not carry a general obligation to watch the domain names registrations, prior to or during the registration, given the large number or registrations and the automatic registration procedure. Nevertheless, the registry must react after being asked by the holder of rights who gives evidence of them, if the infringement is so obvious that a non-lawyer would realize it.
OGH, Urteil vom 12.9.2001, 4 Ob 176/01p

BELGIUM: DNS.BE was found abusing its dominant position, for refusing to sell certain names without any reason.
Comm. Bruxelles, cess., 8 nov. 2000, A.C. 8.286/2000
But the fact of refusing to sell names because they are generic was not in itself found abusive.
Civ. Bruxelles, réf., 28 janv. 2000, R.R. 2000/107/C

FRANCE: A decision is often but improperly presented as stating that a registrar can be liable for letting a client register an infringing name. This registrar only had to pay for the judicial expenses along with the defending cybersquatter.
TGI Paris, réf., 10 avril 2006
The abuse of its dominant position by the French registry was at stake in 2000 before the Competition Council, but this court did not have to rule on this issue since the registry modified the practice which was criticized (it refused to sell generic names).
Conseil de la Concurrence, 9 juin 2000, 00-D-32

GERMANY: DE-NIC can be liable under trademark law if it indirectly causes a trademark infringement by registering a domain name obviously identical with a famous trademark.
OLG Frankfurt/Main Urteil vom 14.09.1999 11 U Kart 59/98
Registrars are deemed access providers, as they grant access to third parties via the names.
LG Leipzig Urteil vom 13.11.2003 12 S 2595/03

HUNGARY: The Highest Court ruled that a registrar can be liable for contributing to a trademark infringement.
Legfelsőbb Bíróság a Pf. IV. 25 696/2002/5

==> If you have other national cases to report (EU or non EU), or have more accurate information to report, please mention them in the comments.
Thanks in advance!

May 08, 2008

Retour sur l'affaire champagne.ch

J'avais évoqué cette décision sur la base des articles de presse qui l'évoquaient. Après avoir pris connaissance de la décision (prochainement sur Juriscom.net), je trouve que celle-ci est critiquable. Voici l'extrait :
* sur l'exploitation du site internet à l'adresse champagne.ch
Il ressort des copies écran de ce site que :
- celui-ci est en langue française ;
- il contient une présentation des activités des sociétés CORNU dans la fabrication industrielle de gâteaux apéritif :
- sur la page d'accueil, il n'est pas fait état des dénominations sociales CORNU ; cette page porte uniquement la mention "recette de Champagne", le terme "de Champagne" étant inscrit en gros caractère bleu marine.
Le tribunal considère que tant le nom de domaine que son exploitation accessible depuis le territoire français constitue pour les mêmes motifs que précédemment une atteinte à l'appellation d'origine contrôlée Champagne, l'utilisation du terme "Champagne" pour désigner les fabrications industrielles CORNU étant de nature à affaiblir la notoriété de l'appellation d'origine CHAMPAGNE.
La motivation n'est pas critiquable : les appellations d'origine ont une protection particulière, et Champagne est certainement la plus particulière des appellations ! Le tribunal stigmatise donc fort logiquement l'atteinte qui résulte du site. Mais c'est seulement le site qui est visé ici. Pourquoi donc le tribunal choisit-il ensuite d'ordonner :
à la société suisse CORNU titulaire du nom de domaine champagne.ch de procéder à la radiation de ce nom de domaine sous astreinte de 150 euros par jour de retard, passé le délai de deux mois suivant la signification du présent jugement
?
En effet, le nom de domaine pouvait être, ou pourrait être, utilisé pour d'autres contenus que celui critiqué par le tribunal : contenus en d'autres langues (le tribunal ne vise d'ailleurs expressément que ce qui est en français), ou contenus qui ne sont pas de nature à porter atteinte à l'appellation. En toute logique, la sanction aurait dû être relative à l'usage du nom, sans aller jusqu'à la radiation.