April 30, 2009

Utilisation par un affilié d'un nom de domaine similaire à celui de l'annonceur

La société Trokers exploite la plateforme d'intermédiation 2xmoinscher.com. Elle utilise cette dénomination en tant que nom commercial, et dispose de deux marques, l'une semi-figurative et l'autre verbale, reprenant ce vocable. En outre, elle est réservataire des noms correspondants en .net, .org, .biz et .fr (ainsi que de variantes).
Nous sommes mi-2006. Cette société constate que renvoient vers son site les noms 2xmoinschers.fr et 2moinscher.fr, qui pourtant ne lui appartiennent pas ! C'est la société Web Vision, affiliée de Cibleclick qui relayait les publicités de Trokers, qui utilisait ainsi ces noms de domaine. Après mises en demeures, Web Vision choisit de ne pas renouveler les noms de domaine (toutefois sans les transférer à Trokers, qui l'exigeait).
En mai 2007, cette fois c'est l'adresse 2xmoinscheres.com qui est utilisée de la même façon. Trokers change son fusil d'épaule, et demande à Cibleclick de faire cesser cette réorientation automatique. Le nom sera abandonné.
En décembre 2007, Trokers assigne en contrefaçon de ses marques, site, et titre de site, ainsi qu'en responsabilité délictuelle pour atteinte à ses signes distinctifs.

Le tribunal juge qu'il ne peut y avoir de contrefaçon de marque dans ce cas singulier de renvoi vers le site original :

la contrefaçon n'est réalisée que lorsque la dénomination litigieuse sert à désigner un produit ou service identique ou similaire aux produits et services désignés par la marque imitée et crée un risque de confusion avec ces derniers.
Or, en l'espèce, la société Web Vision n'a pas créé de site correspondant aux noms de domaine en cause mais utilise l'adresse URL uniquement pour réorienter les intemautes vers le propre site de la demanderesse.
L'usage qu'elle effectue de cette dénomination, ne peut ètre considéré comme un usage a titre de marque pour identifier ses propres produits et services et créer une confusion avec les produits ou services proposés par la société Trokers sous ses deux marques.
La réservation par la société Web Vision des trois noms de domaine litigieux et l'exploitation qu'elle en a effectuée, ne sont donc pas susceptibles de constituer des actes de contrefaçon des marques de la société Trokers.
Dans le même élan, comme le défendeur n'a pas copié le site, il est jugé qu'il ne peut y avoir de contrefaçon de celui-ci.

Quant au nom de domaine en l'espèce, il est jugé qu'il ne peut s'agir d'un titre protégeable en application de l'article L. 112-4 du code de la propriété intellectuelle : "les noms de domaine réservés par la société Web Vision ne sont pas des titres d'oeuvres de l'esprit mais des identifiants uniques liés à des entités dont les ordinateurs sont reliés au réseau Internet".

Quant à l'atteinte au nom commercial et aux noms de domaine 2xmoinscher.com, le tribunal observe :

L'activité de la société Web vision objet du présent litige, repose sur deux actions :
- la réservation de noms de domaine très proches de ceux de la demanderesse,
- l'affiliation au réseau créé par la société Cibleclick et la participation à son activité publicitaire en vue de percevoir des rémunérations.
La société Cibleclick a créé un réseau comprenant des annonceurs et des titulaires de sites Internet. Les annonceurs proposent des actions publicitaires que les titulaires de sites acceptent de mettre en oeuvre moyennant une rémunération. La société Cibleclick enregistre chacune des opérations (visite, formulaire, achat) effectuées auprès de l'annonceur par un visiteur du site de l'affilié et calcule la rémunération qui lui est due en fonction de l'activité générée au profit de l'annonceur.
La société Trokers a adhéré a ce réseau en sa qualité d'annonceur. La société Web Vision s'y est également affiliée. En orientant les internautes vers le site 2xmoinscher.com, il (sic) perçoit des commissions versées par la société Trokers par l'intermédiaire de la société Cibleclick.
Ainsi, la société Web vision capte le trafic généré par les internautes commettant des erreurs dans la saisie de l'adresse URL, du site de la demanderesse et s'inscrit ainsi dans son sillage. L'utilisation de ses propres noms de domaine n'est en effet que la conséquence de la volonté des internautes d'accéder au site de la demanderesse, et ne résulte pas d'une action propre de la société Web Vision et de l'interêt que susciterait celle-ci auprès des intemautes.
Ainsi, la défenderesse ne crée aucune valeur mais se contente d'exploiter, sans son accord, celle que la société Trokers a su conférer à son site par son savoir-faire et ses investissements.
Par ailleurs par son affiliation à la société Cibleclick, la société Web Vision va obtenir de la société Trokers 1e versement d'une rémunération alors que loin de la faire profiter de la fréquentation d'un site crée par la défenderesse, elle ne fait que lui "vendre" une fréquentation générée par son propre site 2xmoinscher.com.
Le fait que la société Web Vision réoriente les internautes égarés vers le site qu'ils voulaient consulter constitue un service que la société Trokers n'a pas demandé, que la société Web Vision ne peut lui imposer et pour lequel elle ne peut obtenir de sa part une rémunération à laquelle elle n'a pas consenti. Il convient au surplus de relever que la prestation de la société Web vision a une valeur propre très réduite puisque la plupart des internautes ayant commis une erreur seraient parvenus sur le site 2xmoinscher.com en procédant à une nouvelle
saisie de I'adresse URL.
II ressort de l'ensemble de ses éléments que la société Web vision s'est ainsi appropriée la valeur économique que la societé Trokers a su conférer à ses noms de domaine et la demanderesse a subi un prejudice tant matériel que moral tenant au versement par elle d'une rémunération injustifiée mais aussi à l'exploitation de ses investissement et de sa renommée largement établie par de nombreux articles de presse.
Au surplus, la société Web Vision en réservant des nonis de domaine très proches de ceux de la demanderesse puis en les abandonnant, a contraint la société 2xmoinscher.com à de nombreuses démarches afin d'en obtenir l'attribution et de supprimer ainsi ce risque de confusion volontairement créé par la défenderesse.
En revanche la société Web Vision ayant exclusivement utilisé les noms de domaine litigieux en vue de réorienter les internautes vers le site de la société 2xmoinscher.com il ne ressort pas de ces faits une atteinte spécifique au nom commercial de la société Trokers, les internautes moyennement attentifs n'ayant pas conscience de l'intervention de la société Web Vision.
En définitive, tombe une condamnation à 15.000 € de dommages-intérêts.

[TGI Paris, 2 avril 2009]

April 29, 2009

L'accès aux contenus illicites : est-il possible de filtrer internet par disposition législative ?

La loi pour la performance de la sécurité intérieure s'annonce à l'horizon. Jean-Michel Planche révèle qu'elle prévoit en particulier d'« impose(r) aux fournisseurs d’accès à Internet l’obligation d’empêcher sans délai l’accès aux contenus illicites dont les adresses électroniques sont désignées par arrêté du ministre de l’intérieur sous peine d’un an d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende
S'agissant d'un texte pénal, le choix de faire référence aux "adresses électroniques" plutôt qu'aux noms de domaine n'est pas neutre... et s'annonce d'ores et déjà de mise en oeuvre délicate. Tout à la fois, si d'aventure était utilisée l'expression "noms de domaine" (ou "adresses IP"), l'effet pourrait être de conférer une portée trop large au texte.
Les tentatives législatives de mettre en place le filtrage internet s'avèrent décidément pleines d'embûches.

Un moteur de recherche peut-il engager sa responsabilité pour cause de référencement ?

« Dans la mesure où il fait intervenir un robot indexeur et qu'il n'a ni créé, ni hébergé l'information litigieuse, il n'a pas à sa charge d'obligation automatique de surveillance » a jugé la cour d'appel de Paris. Mon commentaire sur dalloz.fr aujourd'hui.

April 23, 2009

Peut-on donner le vrai nom d'une célébrité ?

L'humoriste Jean-Yves L. a obtenu la condamnation de MySpace suite à la création sur ce site d'un profil myspace.com/lafesse, sur le fondement de l'article 9 du code civil français :
La mention, sans l'autorisation de Monsieur L., de sa véritable identité dans le cadre d'un "profil" dont il n'a pas eu l'initiative constitue une atteinte aux droits de la personnalité de Monsieur Jean-Yves L.
La décision peut rappeler celle remontant à fin juillet 2000, qui avait sanctionné la création d'une page à l'adresse geocities.com/bertranddelanoe.
Néanmoins, s'il y a sanction ici (10.000 € de dommages-intérêts), ce n'est pas pour utilisation du pseudonyme de l'artiste dans l'URL, ou pour l'usage de son nom et de photos sur le profil créé à son insu : le tribunal a sanctionné la révélation de l'identité véritable du comique.


Voilà qui paraît très sévère. Car cette information est très aisément disponible par ailleurs, que ce soit à la première ligne de sa notice Wikipedia, sur des sites spécialisés.... ou plus simplement dans les nombreux articles (exemple) évoquant les décisions de justice rendues ces derniers mois à l'initiative de ce même plaideur !
On peut légitimement se demander si, s'agissant du pseudonyme d'une star, le droit à l'information du public ne doit pas prévaloir sur le respect à la vie privée d'une personne publique.

[Paris, 25 mars 2009]

April 22, 2009

Second UDRP decision by the Czech Arbitration Court : French journal Le Républicain Lorrain wins republicainlorrain.com (100034).

April 19, 2009

Affaire(s) Ovidio : le retour

En septembre 2007, un collège de trois arbitres avait décidé le transfert des noms placement.eu et emprunt.eu au titulaire de deux marques semi-figuratives belges (Benelux) PLACEMENT et EMPRUNT. S'opposant à cette décision lui faisant perdre l'un de ses milliers de noms de domaine, la société chypriote Ovidio a contesté la décision devant le tribunal de commerce de Bruxelles. Il y a quelques jours, celui-ci a rejeté son recours.

La société Ovidio souhaitait profiter de l'instance pour faire juger qu'elle a un intérêt légitime à faire enregistrer des termes génériques à titre de noms de domaine afin de les exploiter dans le cadre de la navigation directe. Le tribunal a jugé irrecevable cette demande, qui dépasse le cadre du litige par sa généralité.

Le tribunal n'est pas convaincu que les marques PLACEMENT et EMPRUNT doivent être annulées, faute de preuve de l'absence de caractère distinctif, ou qu'il doit y avoir déchéance de l'une d'elles, là aussi faute de démonstration de l'absence d'utilisation.

Ovidio fait-elle un usage légitime des noms de domaine litigieux, qui lui permettrait de conserver les noms en application du règlement communautaire ?
Le tribunal observe que ces noms sont en parking, et que les pages qui leur sont associées n'ont pas de contenu significatif, ne faisant que renvoyer à d'autres sites. Il juge que "le recours à un service de parking [de] noms de domaine ne constitue pas en soi un usage légitime".
Ce faisant, le tribunal ne fait pas une correcte application de l'article 21.1 sur lequel il s'appuie. En effet cet article permet une sanction quand un nom "a été enregistré sans que son titulaire ait un droit ou intérêt légitime à faire valoir sur ce nom", or le tribunal n'apprécie pas l'enregistrement, mais l'usage sans intérêt légitime.

Il est fort à parier que cela pourra être débattu lors de l'appel, s'il y en a un.


[Merci à Me Etienne WERY de m'avoir signalé la décision]

April 17, 2009

How to use a domain name to circumvent application of law


Interesting article in the NYT: When they advertise in the USA, pharmaceutical companies must include risk information about the drug. When they use Google AdWords, they cannot do it, as there is a 95 characters limit. According to the Food and Drug Administration, such ads omit “the most serious and frequently occurring risks associated with the drugs promoted in the links above” (see for example FDA's letter to Merck).

So, what trick can they use?
To avoid the risk-disclosure rule, companies are now using generic-sounding Web addresses that redirect users to the brand’s site.Propecia, which was cited by the F.D.A., now runs ads with a link not to Propecia.com, but to a site called hair-loss-medication.com that redirects to Propecia.com. Another solution companies are using is to include the brand name and generic name, but to remove any mention of what the product treats, which results in ads like, “Flomax® (tamsulosin HCl) www.4FLOMAX.com Capsules, 0.4 mg - Official Site for Important Product Information.”
(Read the full article for the other problems this solution may bring)

International Domain Name Law


I reviewed David Lindsay's book International Domain Law - ICANN and the UDRP for the April 2009 issue of Script-ed. You may read it here.

April 15, 2009

Quelles sont les règles juridiques relatives à l'enregistrement d'un "screen name" sur Twitter ?

Elles sont simples : You are solely responsible for (...) any (...) screen names (...) that you submit, post, and display on the Twitter.com service [article 6 des Basic Terms]. C'est très justement que Vincent Gautrais loue la légèreté des conditions contractuelles de ce service !

Quand on compare aux règles d'enregistrement de noms de domaine, de noms de blogs MSN, de descripteurs sur eBay, de codes sur un portail mobile, ou de noms sur Second Life, on pourrait se demander pourquoi ces règles sont si longues... Mais il ne faut pas se méprendre : ce n'est pas parce que la règle est exprimée sobrement qu'il n'y a pas de règle. Le droit commun et les droits spéciaux s'appliquent donc à tout screen name !

April 14, 2009

Résolution de cas de violations manifestes des dispositions du décret du 6 février 2007 : une trentaine de décisions

Ce sont désormais plusieurs dizaines de décisions PREDEC qui sont accessibles sur le site de l'A.F.N.I.C. Rappelons que cette procédure permet au registre de traiter directement de violations manifestes des règles du code des postes et communications électroniques relatives aux noms en .fr. Voici un résumé de ces décisions.

mon-service-public.fr (# 12) : transfert au Ministère du Budget de ce nom, le titulaire ayant manifesté son accord en ce sens (était fait référence à une marque appartenant à la Documentation Française et non à ce demandeur, mais celui-ci invoquait aussi le risque de confusion avec le nom d'un service public).

abilys.fr (# 13) : transfert au titulaire de la marque ABYLIS (avec assentiment du titulaire)

likebike.fr (# 15) : ce nom est transféré au distributeur exclusif de cette marque en France (distributeur qui ne semblait pourtant pas justifier d'une licence). C'est donc une interprétation large de la notion de "droit ou intérêt légitime" que semble retenir le registre.

parisnormandie.fr (# 16) : transfert au titulaire de la marque PARIS NORMANDIE de ce nom utilisé pour du parking.

enchere-privee.fr (# 17) : pas de transfert. La marque est postérieure de deux ans au nom, et il n'est pas prouvé que le titulaire n'avait pas de droit ou d'intérêt légitime.

sensy.fr (# 18) : pas de transfert au titulaire de la marque SENSY, car le nom aboutissait à une page blanche, et donc il n'existait pas de confusion.

schwartz.fr (# 20) : il s'agit ici d'un cas reposant sur l'allégation d'une atteinte à un nom patronymique. Il est estimé "qu'un doute subsist[e] sur l'absence d'intérêt légitime du titulaire ou sur sa bonne foi", ce qui profite à ce dernier. Pas de transfert.

maul.fr (# 21) : le demandeur alléguait que le nom était vendu sur Sedo (par NetTrafic son titulaire), mais sa prétention est rejetée faute de preuve. Pas de transfert.

aeroport-marseille.fr (# 19) : le titulaire ayant donné son accord pour le transfert au titulaire de la marque AEROPORT MARSEILLE PROVENCE, le registre en prend acte.

parispascher.fr (# 22) : cette affaire est procéduralement intéressante, car c'est la deuxième fois que le demandeur saisissait l'A.F.N.I.C. à propos du même nom (voir décision # 5). Le demandeur avait perdu la première fois pour n'avoir pas motivé en quoi le défendeur ne disposait ni de droit ni d'intérêt légitime. Il revient ici à la charge avec un argumentaire beaucoup plus conséquent. Il est conclu à la mauvaise foi du titulaire de ce nom enregistré le 21 mai 2004.

seolis.fr (# 23) : refus de transfert au titulaire de la marque SEOLIS de ce nom de domaine non exploité.

russellhobbs.fr (# 26) : transfert au titulaire de la marque communautaire RUSSELL HOBBS de ce nom parqué.

cuircenter.fr (# 30) : transfert de ce nom parqué au titulaire de plusieurs marques CUIR CENTER.

brunoy.fr (# 31) : s'agissant d'un nom de commune, il est conclu à la violation des règles du décret.

cigartex.fr (# 32) : le nom de domaine a été enregistré 5 jours avant la marque. De plus, les pièces produites ne permettent pas de retenir la violation des règles. Pas de transfert.

tourizoom.fr (# 33) : au moment du choix du nom, il ne pouvait y avoir de confusion avec la marque TOURIZOOM du demandeur, qui date du 31 juillet 2008 alors que le nom a été enregistré le 13 juin de la même année.

arras.fr (# 35) : s'agissant d'un nom de commune, il est conclu à la violation des règles du décret.

baby.fr (# 36) : même si ce nom était utilisé pour du parking, il est constaté qu'il a été enregistré régulièrement en 2003, doute suffisant pour ne pas ordonner le transfert.

electronique-cigarette.fr (# 37) : le demandeur se plaignait de l'utilisation de sa marque CIGARTEX sur le site du défendeur. Il est logiquement constaté que le nom de domaine n'est pas identique à cette marque.

weo.fr (# 38) : du fait de la concomitance du dépôt de la marque par le demandeur et de l'enregistrement du nom par le demandeur, tous deux exerçant dans des domaines voisins, le doute profite au second. Pas de transfert.

italielocappart.fr (# 39) : le titulaire a proposé le transfert du nom identique à l'enseigne du demandeur, qui notait que le nom était utilisé en parking.

wittenheim.fr (# 40) : s'agissant d'un nom de commune, il est conclu à la violation des règles du décret.

merignacauto.fr (# 41) : le demandeur s'appuyait sur ses nom commercial, dénomination sociale, et nom de domaine en .com, autant de signes qui ne sont pas dans le champ de la procédure. Sa demande est rejetée.

bruch.fr (# 44) : s'agissant d'un nom de commune, il est conclu à la violation des règles du décret.

oralb.fr (# 45) : le nom est jugé "identique" à la marque ORAL-B. Comme il est exploité pour du parking, son transfert est ordonné.

airsoft-one.fr (# 46) : le requérant s'est appuyé sur son nom commercial et son enseigne, qui ne sont pas protégés par le décret. Rejet de sa demande.

caisse6epargne.fr (# 47), lacaissedepargne.fr (# 48) : susceptible d'être confondu avec la marque CAISSE D'EPARGNE + parking = transfert.

natalys.fr (# 49) : "à défaut d'éléments fournis par le Requérant sur l'absence d'intérêt légitime du Titulaire à faire valoir sur ce nom de domaine et sur sa mauvaise foi", il est jugé qu'il n'y a pas de violation manifeste (le requérant indiquait que le nom était en parking ; visiblement, il ne l'a pas démontré).

europage.fr (# 50) : transfert à la société Europages (titulaire de marques EUROPAGES) par déclaration du défendeur

tarascon.fr (# 51) : nom de commune, transféré à cette ville

mp2.fr (# 52) : transfert de ce nom parqué au requérant qui détient plusieurs marques françaises comportant le sigle MP2.

saint-junien.fr (# 53) : transfert à la commune du même nim

tube.fr (# 54) : est retenue la bonne foi du titulaire, qui avait enregistré le nom en 2005 pour le compte d'une personne morale, l'a ensuite enregistré en son nom propre, et le fait pointer vers une page vierge.


Quelques remarques générales :

  • si la procédure est relative aux violations manifestes des règles décrétales, cela n'a pas été compris par tous les plaideurs : plusieurs des requêtes étaient vouées à l'échec, étant clairement hors cadre
  • plusieurs procédures se sont terminées par un accord à l'amiable
  • il est heureux de constater que plusieurs décisions s'inscrivent dans le droit fil de la décision Locatour de la Cour de cassation, et que l'A.F.N.I.C. ne développe donc pas une "jurisprudence" autonome sur la base du décret
  • quelques interrogations procédurales demeurent, notamment sur l'application possible de la procédure en fonction de la date d'enregistrement

April 12, 2009

Wat-atastrophe industrielle

Wat TV, qui se présente (présentait ?) comme la première plateforme vidéos francophone légale, avec 5 millions de visiteurs uniques, ne répond plus.
A la place de la page d'accueil habituelle, c'est une page parking sur laquelle tombent les visiteurs. Un petit tour par le whois montre que la date anniversaire du nom est le 11 avril. Quelqu'un aurait donc réussi à contourner la redemption period - ou alors n'existe-t-elle pas en .tv ?

Concrètement, cela signifie que quelqu'un est en train de s'enrichir grâce aux clics qui ne manqueront pas de se perdre sur les liens sponsorisés figurant, non seulement sur la page wat.tv, mais aussi sur toutes les URL comme wat.tv/aproposwat ou blog.wat.tv.
Cela pourrait vouloir dire aussi que cette personne est susceptible de recevoir les messages adressés aux personnes qui utiliseraient une adresse e-mail se terminant par @wat.tv.

Du côté du groupe TF1, c'est certainement une cellule de crise qui doit se réunir actuellement, car il est urgent de reconstituer l'identité numérique de Wat TV, et l'accès : nouveaux noms de domaine, et référencement payant, sont les solutions les plus rapides à mettre en oeuvre, si le nom n'est pas rapidement rétabli.

Wat you see is Wat you get...

Capture d'écrans et autres détails sur BienBienBien (et merci à Vincent G.).

[MAJ deux heures plus tard : après en avoir prévenu le registrar, il m'a été indiqué qu'"il s'agit juste d'un problème technique de desactivation. Le nom va être rétabli rapidement"]

[MAJ douze heures plus tard : selon 20minutes, "«Il ne s'agit pas d'un oubli de paiement pour le renouvellement du nom de domaine», a souligné Oliver Abecassis, directeur de Wat.tv. «Pour le moment nous ne connaissons pas l'origine du bug, mais nous espérons que ce sera réglé très vite», a-t-il poursuivi"]

[MAJ quinze heures plus tard : toujours selon 20 Minutes, le site serait de nouveau accessible. Les internautes devraient pouvoir le constater à mesure que les nouvelles données se propageront sur les serveurs DNS de par le monde]


[MAJ, h + 16 : résurrection pascale, le site est de nouveau normalement accessible depuis la France. Voir les explications sur le blog de WAT

En définitive, que s'est-il donc probablement passé ?
En fait, le nom de domaine n'a pas été entièrement perdu, contrairement à ce que j'ai d'abord cru en apprenant hier soir ce qu'il se passait.
Habituellement, quand un nom passe subitement en parking, c'est qu'il a fait l'objet d'un "drop", autrement dit il est retombé dans le domaine public. Cela ne se produit normalement pas immédiatement à la date d'expiration, mais après un délai de grâce. C'est ce délai que l'on appelle redemption period. Pendant cette période, le titulaire a priorité pour ré-enregistrer le domaine (souvent avec des frais)... et le site auquel il est combiné reste accessible.
Voyant le nom en parking, j'en ai déduit que, comme il s'agit d'un nom en .tv - qui est un domaine dont les règles d'enregistrement et de fonctionnement sont singulières - il était déjà tombé dans le domaine public, et récupéré par un autre (non encore connu au moment où j'ai consulté le whois, qui n'est pas automatiquement mis à jour).
En fait, il y a bien redemption period pour les .tv, mais avec particularité : dès le début de cette période, les serveurs DNS (serveurs qui associent des noms de domaine à des ressources) sont modifiés, et sont utilisés des serveurs pointant vers des pages parking !
Voilà donc ce qu'a vécu Wat : l'adresse ne renvoyait plus à ses serveurs, mais à de nouveaux serveurs. Il a fallu quelques heures pour que cela revienne en sens inverse, suite à ré-enregistrement.
]

April 02, 2009

Comment La Chaîne Parlementaire a récupéré le nom lcp.fr

Explication illustrée de la procédure PREDEC de l'A.F.N.I.C., en prenant l'exemple du nom lcp.fr.


(la vidéo, c'est terriblement efficace pour repérer les tics de langage...)

April 01, 2009

Hyperbate

Depuis 0 h 00 ce matin, l'ensemble du système de nommage a été inversé, suite à des modifications opérées par le CERN.
On se souvient que c'est au sein de l'Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire qu'il y a vingt ans naissait le World Wide Web, sur la base du travail de Tim Berners-Lee. Ce dernier avait ébauché une page de schéma pour indiquer comment relier les ordinateurs entre eux, ce qui a donné naissance à l'une des plus grandes révolutions contemporaines.
Interrogé par le journal suisse Le Temps le 16 mars 2009, le célèbre inventeur a indiqué qu'il avait des regrets :

Deux, a glissé l’inventeur. D’avoir forcé les internautes à taper «//» au début d’une adresse, et de ne pas avoir créé les noms de domaine dans l’autre sens – ch/cern/info au lieu de info.cern.ch, par exemple.
A la lecture de cette interview du père du W3, se souvenant des enseignements de Pierre Dac - "Un sens interdit, en somme, ce n'est qu'un sens autorisé, mais pris à l'envers" - une équipe du W3C a voulu faire plaisir à Tim Berners-Lee, et inverser le sens des noms de domaine.
Après quelques légères difficultés techniques (le script butait sur des palindromes), l'équipe est arrivée en quelques jours au retournement souhaité. La nouvelle base de données a été implémentée dans la nuit, et fonctionne depuis quelques minutes.
Ce site est donc désormais disponible depuis l'adresse com.blogspot.domaine. Quelques bugs sont toutefois à noter pour les noms comportant un tiret. Par exemple, on accède actuellement au site du Premier Ministre par l'adresse fr.gouv.ministre-premier, mais tout devrait bientôt rentrer dans l'ordre.


Les chercheurs qui ont procédé aux modifications sont ravis du résultat, et plus encore d'avoir fait plaisir à Tim Berners-Lee, qui se serait exclamé : "c'est hyper bath !". En revanche, du côté de l'ICANN, c'est le désarroi le plus complet. L'institution a convoqué le Board en urgence, et c'est dans la journée que l'on devrait savoir si le projet de création de nouveaux TLDs est ou non abandonné.


[Hyperbate : figure de style qui consiste à intervertir l'ordre naturel des mots]